« J’avais retrouvé Kesey un après-midi d’août dans les studios d’une station télé de Frisco ; après avoir sifflé quelques bières avec lui, je lui ai annoncé que je devais passer déposer un disque brésilien pour Frenchy, à la Boîte de Vitesses. Il m’accompagna et, sitôt arrivé, fit grosse impression sur les Angels, encore au boulot. Après plusieurs heures passées à picoler, bâfrer et partager le joint symbolique, Kesey invita toute la section de Frisco à la fête qu’il donnait le samedi suivant à La Honda, où il partageait trois hectares de terrain un peu en retrait de l’autoroute avec sa bande, les Merry Pranksters, et où régnait vingt-quatre heures sur vingt-quatre une ambiance délirante. »
« A la tombée de la nuit, la propriété de Kesey regorgeait de monde et de musique sous les lumières psychédéliques auxquelles les gyrophares rouges et orange de voitures de police ajoutaient une touche sympathique, illuminant les bois et le remblai, de l’autre côté de la route. »
« Le 31 janvier 1966, Kesey, en liberté provisoire, disparut de la circulation, laissant son camion abandonné sur la côte californienne avec un message annonçant qu’il s’était suicidé, mais qui ne convainquit même pas les flics. » (p. 296-297)
« Avant que les Angels ne s’abattent sur La Honda comme des sauterelles, les orgies lysergiques de Kesey consternaient déjà les fanas respectables de l’acide – psychiatres, scientifiques et autres spécialistes du comportement, persuadés que le LSD ne doit être expérimenté que sous contrôle et sous l’observation vigilante de mentors expérimentés, par des cobayes triés sur le volet, pour éviter les voyages dangereux. »
« Pourtant, les habitués de chez Kesey s’en faisaient beaucoup moins. En principe, la porte de Kesey était ouverte à tous. Seulement, il faut bien dire qu’un non-initié ne pouvait se sentir à l’aise au milieu de défoncés fixant les étrangers sans les voir. L’acide ne facilite pas tellement les conversations mondaines […] » (p. 303-305)