La Terre Vaine est l’un des plus longs poèmes jamais écrit en langue anglaise. Il se compose même en 5 chapitres et s’accompagne de notes (c’est vous dire s’il est un peu complexe à suivre).
C’est une poésie visuelle qui joue avec des images évocatrices : juxtaposition  sublime/splendide, pathétique/ironie, ancien/moderne. Ce choix a pour conséquence l’impersonnalité de la voix poétique : le « je » varie sans cesse, du féminin au masculin, d’un personnage à un autre ; il n’y a pas d’identité établie. Ce poème repose sur certains choix esthétiques.
Une méthode mythique
L’un des principes fondateurs de ce poème est de parler du présent par le prisme de figures mythiques du passé. Cette prise de position est très moderne pour l’époque et se place dans la lignée de la réutilisation du mythe de l’Odyssée par Joyce (Ulysse, 1921). Cette méthode d’écho à travers les âges permet à Eliot de révéler les enchevêtrements de la société à travers le temps : cycles, allers-retours, échos, mise en parallèle.
Parmi ses références, on compte aussi des insertions médiévales comme la référence au roi pêcheur, maître d’un royaume pris dans une malédiction qui le rend, lui, impuissant et son peuple stérile. La malédiction n’est levée que lorsqu’un étranger vient et pose certaines questions, ce qui rappelle la légende du Graal, Perceval, au bout de sa quête devant répondre à des questions pour atteindre le Graal (coupe qui a recueilli le sang du Christ).
Collage
La Terre vaine repose sur une esthétique de la discontinuité : juxtaposition de fragments qui n’ont pas le même registre, la même personne ou la même temporalité. C’est pour Eliot une façon de symboliser le monde moderne, son chaos. Le poème met en scène cette situation où l’homme ne trouve plus de cohérence.
Eliot récupère des vers d’autres textes en les modifiant ou pas. Ces emprunts sont pour lui le symbole d’une grandeur possible si on se retourne vers le passé : ces bribes sont tout ce qui reste (« Je veux de ces fragments étayer mes ruines »).
La Terre vaine est souvent lu comme une interprétation de l’état mental d’après la deuxième guerre mondiale : une société dégénérescente  devenue une terre vaine. Grâce à des choix esthétiques modernistes, Eliot tente de revenir à un monde antérieur, dans un passé où l’ordre et le calme semblaient régner.
Les choix esthétiques d’Eliot donnent un poème construit sur une musicalité qui reposent sur l’entrelacement des thèmes et des significations. Entrelacs dans lequel se mêlent diverses influences : le graal, les mythes de fertilité, La Divine comédie de Kant, Baudelaire, Ovide et ses Métamorphoses, la Bible, Les Confessions de Saint Augustin, Le Sermon du feu de Boudha… C’est un peu une façon de puiser dans le passé pour qu’un monde nouveau renaisse de ses cendres.
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