« Je viens de recevoir mes papiers militaires pour partir à la guerre […]. Monsieur le président, je ne veux pas la faire. Je ne suis pas sur Terre pour tuer des pauvres gens. […] Ma décision est prise, je m’en vais déserter. »
Zweig a toujours été un fervent défenseur de la paix et du pacifisme. Sa correspondance en témoigne à de nombreuses reprises notamment à propos de la guerre 14-18. Et on sait ce qu’il pensait de la seconde, puisqu’il se suicide en 1942, dégoûté par la prise de pouvoir d’Hitler et l’aliénation de son pays qui se laisse annexer sans pratiquement opposer de résistance et accueille le Führer avec des ovations. 
Lui, il l’a vue venir depuis longtemps, cette aliénation raciste et absurde, il en parle déjà dans des lettres des années 1910, effaré par les signes avant-coureurs d’un antisémitisme farouche qui le touche personnellement, puisqu’il est juif. Il est très jeune conquis par le militantisme pacifiste aux côtés de son ami de toujours, Romain Rolland, qui prôna tout au long de sa vie une humanité sans frontières pour laquelle les haines et les guerres ne devraient pas exister puisque tous les peuples devraient, naturellement, vivre en harmonie et en toute solidarité.
C’est pourquoi la chanson « Le déserteur » de Boris Vian (1955) paraît toute destinée à servir de bande son à notre écrivain humaniste et pacifiste. 
Sans aucun doute le plus grand succès de Vian dans la musique jazz, « Le déserteur » est devenu l’Hymne pacifiste international. Quand il l’écrit après la chute de Diên Biên Phu et à l’aube de la guerre d’Algérie, Vian voit surtout dans cette chanson un hymne pro-civil et pro-humaniste plutôt que purement antimilitariste. Il insiste sur ce point en changeant les dernières paroles d’origine par « Si vous me poursuivez/Prévenez vos gendarmes/Que je n’aurai pas d’armes/Et qu’ils pourront tirer » plutôt que le « Je sais tirer », un peu plus agressif du chanteur original de 1954 (Mouloudji). La chanson deviendra même « The Pacifist » en anglais, chantée par Peter, Paul & Mary.
« Le déserteur » de la chanson écrit une lettre au président de la République pour lui annoncer qu’il refuse de participer à la guerre et que, assumant pleinement son geste, il ne tient pas à fuir indéfiniment face à l’armée. S’ils le prennent, il restera fidèle à ses valeurs et ne tirera jamais sur personne, qui que ce soit : il a déjà trop connu de guerres et de larmes. « S'il faut donner son sang, allez donner le vôtre, vous êtes bon apôtre, monsieur le Président. »
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