Enfant terrible du rock français, Saez compte dans ses influences des artistes de la chanson poétique comme Ferré, Brel, ou Patti Smith, mais aussi des influences littéraires telles que Rimbaud et Baudelaire, dont il met en musique certains poèmes comme « Femmes damnées ».
Mais le parallèle ne s’arrête pas là car Saez compte parmi les poètes maudits de la génération des désabusés dont il peint la chronique avec force et rage, extrémisme aussi, toujours à contre-courant du mouvement halluciné de la société quotidienne, toujours en marge pour mieux révéler les aspérités et nuances d’une génération qu’il observe de loin.   
Du poète maudit, Saez a les forces et les faiblesses : visionnaire, écorché, en proie au spleen baudelairien, volontairement isolé, parfois même trop lointain : « Il reste un artiste totalement obnubilé par son œuvre, grillant ses années de vie comme il allume ses cigarettes, trop vite et trop souvent. Viscéralement happé par sa prochaine chanson, son futur album, sa prochaine tournée, ses textes et leurs propos, qu’il rédige sans cesse, alimenté par une formule whisky-coca-café-noir déconseillé par l’ordre des médecins. Mélomane – même mégalo parfois, surpris à parler de lui à la troisième personne -, il succombe à lui-même, sans pouvoir refuser l’appel des notes qui le bouleversent au quotidien. » (p. 148-149)
Comme Baudelaire fut taxé d’outrage aux bonnes mœurs, à chaque nouvel album Saez est accusé de provoc’, de dégradant, de pornographique. Son album J’accuse (référence au J’accuse de Zola) présente sur la pochette la photo d’une femme nue assise dans un caddie – on pense à l’accusation d’outrage à la morale publique faite à l’encontre des Fleurs du mal. Celle de Miami présente des fesses à moitié dissimulées derrière une bible : on pense également à l’accusation d’outrage à la morale religieuse faite aux Fleurs du mal.  
Alors, on censure car à côté des femmes en soutif vendant les rondeurs d’une marque il est certain que ses dénonciations de la société de consommation font mauvais genre : « Une femme nue dans un caddie, outrage aux mœurs du commerce ? » (p. 133), dit-il dans une lettre publiée sur son site officiel. Cette censure tellement significative d’une société mensongère où tout est permis pour vendre mais pas dans la création, où on attaque le packaging sans avoir même écouté le contenu, tellement représentatif d’une société superficielle incapable de voir les nuances.
Saez ne s’arrête pas là, joue encore plus de la provoc’ et n’hésite pas à interrompre ses concerts pour rétorquer. Il entretient aussi cette image de pestiféré, se refuse depuis le début de sa carrière à céder à l’abattage médiatique puisque seule compte son œuvre, pas l’image de celui qui l’a écrite. 

Réf. Bib. : Lejeune, Romain. Damien Saez : à corps et à cris. Éditions Braquage, 2014. 154 p.
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