Lorsqu’il interprète « Blowin in the Wind » au Gerde’s Folk City, en 1961, Bob Dylan annonce qu’elle n’est « pas une protest song […]. Je l’ai simplement écrite comme quelque chose qu’il fallait dire […]. » (p. 79) Dylan en a assez de cette image de super-héros social qu’on lui prête, il veut simplement partager des idées.
Si le public ne retient souvent que la notion de « foutage de merde », la protest song parle d’un événement, d’une idéologie politique, de revendications sociales… Elle transmet une idée forte de façon poignante.
Il y en a différents types : topical song, labour song, freedom song, union song (mélodie et paroles simples entonnées par une foule, comme « Give peace a chance » de Lennon), answer song (conteste une autre chanson engagée), front page song (assemble des gros titres de journaux pour créer un sens différent).
Pierre angulaire de la musique des 60’s (contre le Vietnam et pour les droits civiques), elle a presque disparu aujourd’hui. Elle n’est pourtant pas nouvelle (XIIe siècle) et le chanteur folk, souvent itinérant, informait des news en passant dans les villages bien avant les journaux télévisés.
Keith Richards : « On n’endosse aucune responsabilité quand on gratte une guitare ou qu’on chante une chanson, parce qu’on n’est pas dans une position de responsabilité. » (p. 170) En art, le créateur crée, le public interprète. C’est le problème récurrent auquel a été confronté Dylan. Pour « The times they are a-changin ». La jeunesse y a vu son hymne : écartez-vous de notre chemin, place à la nouvelle génération. Alors que Dylan partage seulement un constat : le Changement est à nuancer, à la fois bon et mauvais.
Quand chacun est libre d’entendre une chanson avec sa propre subjectivité, il ne revient pas à l’auteur d’imposer quoi que ce soit, il ne revient donc pas non plus à l’auditeur de prêter un discours à l'auteur qui n'est peut-être pas le sien.
Malheureusement, des « protest singers » « ont été censurés, arrêtés, tabassés ou même tués à cause du message qu’ils délivraient. » (p. 15). Paul Robeson, communiste, défenseur des droits civiques, dénonciateur de l’Apartheid, a été longtemps persécuté par le gouvernement Macarthyste, tout comme Pete Seeger, Victor Jara est, lui, assassiné par le gouvernement chilien après le coup d’état du 11 septembre 1973. Sa chanson « Canto qué mal me sabes », qui dénonce le fascisme et la dictature, reste inachevée.
« […] l’intérêt des protest songs [...] n’est pas de déplacer l’axe du monde, mais de modifier les opinions et les idéologies, de parler de l’époque dans laquelle on vit et, parfois, de s’apercevoir que ce qu’on dit fait écho à un autre moment de l’histoire, ce qui explique comment Barack Obama en est venu à paraphraser les paroles de Sam Cooke à Grant Park. » (p. 16) : « A change is gonna come ».