Publiée dans un recueil sous-titré « Trois petits drames pour marionnettes », Intérieur devait être une pièce statique jouée par des marionnettes. 
Selon Maeterlinck, les acteurs, personnes incarnées et vivantes, déjà trop pleines, ne peuvent incarner un symbole sans le déformer. Et puisque les hommes sont totalement impuissants face aux forces du destin, quoi de mieux que de représenter cette manipulation par le biais d’un marionnettiste animant des personnages représentant eux-mêmes des idées de personnes ? Il n’y a plus de limite aux mises en abyme possibles dans le théâtre de Maeterlinck.
L’enjeu du drame d’Intérieur, c’est le franchissement d’une porte d’entrée devant laquelle les deux personnages (respectivement nommés « le vieillard » et « l’étranger ») hésitent puisqu’ils doivent annoncer la mort de leur fille à ses habitants avant que le cortège funèbre des villageois ne ramène le corps. Les deux personnages hésitent à faire pénétrer la mort dans cette maison où semble régner la paix familiale qu’ils observent à travers les fenêtres de la maison.
Cette pièce se construit donc autour d’un jeu de regards entre les personnages du dehors qui observent les personnages du dedans : se place d’emblée la thématique du voyeurisme, voir et être vu. Le spectateur suit les propos des personnages du dehors, les personnages du dedans demeureront muets et ignorants de l’attention dont ils sont l’objet et de la nouvelle funeste qui plane au-dessus d’eux, tout au long de la pièce. Cette dichotomie que met en scène Maeterlinck près d’un siècle avant l’ère numérique, résonne encore aujourd’hui en questionnant cette idée du voyeurisme : voir l’intimité sans être vu, voir défiler l’écran d’une vie aux allures harmonieuses en sachant ce qui pourrait la briser.
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