Dans son Histoire populaire des États-Unis, s’il prend le contre-pied des manuels scolaires au profit du point de vue des minorités (castes du peuple reléguées au rang de l’anecdote), Howard Zinn n’oublie pas de dédier tout un chapitre à la minorité souvent la plus oubliée (car esclave par traditions sociales) : les femmes.
Elles furent nombreuses à défendre les droits des autres minorités (esclaves, étrangers, ouvriers, gens du peuple,…) considérant qu’il n’est pas de distinction entre les autres minorités et la leur. Toutes souffraient d’un manque criant de droits fondamentaux : la liberté et la légitimité d’être et de vivre. Elles ne demandaient pas tant la reconnaissance de leur sexe que d’être prises en considération. « Il est parfaitement clair à mes yeux que tout ce qu’un homme a moralement le droit de faire, la femme y est également autorisée » (Sarah Grimké, 1830).
En ce qui concerne la lutte pour la reconnaissance de la « minorité » féminine au XXème siècle aux Etats-Unis, les femmes étaient de tous les fronts.
Elles luttèrent pour l’accès à la connaissance et leur légitimité à intervenir dans sa transmission. Emma Willard qui, en 1821, fonda le premier séminaire de femmes, rapporte : « Certaines mères visitant une classe du Séminaire […] furent si choquées de voir une jeune élève dessiner un cœur […] dans le but d’expliquer la circulation du sang […] qu’elles quittèrent la classe honteuses et scandalisées ».
Elles luttèrent pour le droit social des ouvriers et des ouvrières, aussi nombreuses que les hommes, soumises à la même dureté de travail, mais quasiment deux fois moins payées. En 1824, à Patwtucket, elles furent 200 à protester aux côtés des hommes contre les baisses de salaire et l’allongement du temps de travail.
Elles furent nombreuses aussi, de toutes les classes, à s’ériger contre la fonction domestique donnée pour unique objectif de vie : elles écrivirent des pamphlets, des livres, menèrent des réunions de femmes, cherchèrent des moyens d’évitement de la grossesse (synonyme de l’enchaînement, que la femme apprécie ou non son statut de mère), elles apprirent que la femme ne se doit pas forcément de devenir l’être timide et retenu que leurs mères leur avaient fait croire.
Car il faut bien le dire : si les hommes ont contribué à cette miniaturisation de la femme dans la société, les femmes elles-mêmes n’ont pas été en reste. Elles contribuèrent à assurer la pérennité de la domination masculine en l’inculquant à leurs filles. Des témoignages prouvent que les hommes ont également souffert de ce système arbitraire qui les obliger à subvenir aux besoins de toute la famille quand certains auraient préféré pouvoir exprimer leur aspiration artistique ou scientifique, ou simplement partager les tâches de façon égale.
Références bib. : Tous les exemples et toutes les citations de cet article sont tirés de Zinn, Howard. Une Histoire populaire des États-Unis, de 1492 à nos jours. Marseille : Agone, 2002. Traduit par Frédéric Cotton.[format numérique]
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