#Extrait du Shaker, n°12, Christa Wolf
Références : Becker, Wolfgang. Good bye, Lenin! Ocean Films, 2003. 121 minutes
Parce qu’elle a été l’une de ses plus vives défenseuses et qu’elle refusera longtemps la réunification de son Allemagne communiste avec celle du capitalisme, Christa Wolf me fait toujours un peu penser à la Christiane de Goodbye Lenin !
1989, quarantième anniversaire de la RDA (République Démocratique Allemande). Christiane, l’une des plus ferventes et populistes défenseuses d’un parti qui pâlit, abandonnée par son mari envolé une dizaine d’années plus tôt pour la RFA, est frappée d’un infarctus lors de la manifestation. Elle reste dans le coma pendant huit mois. Entre-temps, de nombreux événements bouleversent l’Allemagne divisée pour aboutir à la chute du mur de Berlin (9 novembre 1989) et à la réunification. Christiane se réveille enfin. Craignant que le choc ne soit trop violent pour sa mère alitée, son fils Alex décide de feindre la pérennisation de la bonne vieille RDA tant adulée par sa mère. Tous les stratagèmes, des plus imaginatifs aux plus absurdes, y passent : enregistrement d’un faux journal télé, récupération de boucaux vides pour garder les étiquettes des anciennes marques de la RDA, récupération des vieux meubles partis à la benne, mensonges qui s’embourbent, etc...
Dans ce film sensible et émouvant, Wolfgang Becker rend hommage à un monde disparu dont de nombreux allemands ont longtemps garder la nostalgie : cette bulle formée par un communisme aux allures d’idéal. Encore sans doute une de ces idéologies montées de toutes pièces pour bercer le peuple d’illusions mais une société de valeurs, de solidarité, résistant encore au raz-de-marée de la mondialisation. Non sans révéler les escarres d’une politique d’embrigadement, Becker sait rendre hommage à ces valeurs qui fondaient encore les partis politiques avant qu’ils ne s’incarnent dans des visages, oubliant qu’ils ne se battent pas pour un seul homme censé les incarnés (et qui ne finit par servir que ses propres intérêts) mais pour des idées communes.
« Le pays que ma mère a quitté était un pays auquel elle avait cru et dans lequel nous lui avions permis de survivre jusqu’au bout. Un pays qui n’a jamais réellement existé sous cette forme. Un pays qui, dans mon souvenir, sera toujours lié à ma mère. »
Film donc de la nostalgie mais la nostalgie d’un monde qu’on ne regrette finalement pas : les enfants, Alex et Ariane, se font rapidement au confort de la nouvelle société capitaliste, mais le souvenir de leur mère flottera toujours au-dessus d’eux pour leur rappeler les valeurs humanistes que le consumérisme tend à faire oublier. Choc entre deux générations donc, mais influences et bienveillance également ; qu’en sera-t-il de la génération suivante, elle qui n’aura plus de lien direct avec cette époque où les valeurs étaient encore au cœur de la société… ?