"All your secret wishes could right now be coming tru and be forever with my poison arms around you. No one ‘s gonna fool around with us. So glad to meet you, Angeles."
C’est à 34 ans, en octobre 2003, à Los Angeles, cette ville qui pactise avec le diable (And sign up with evil, Angeles) qu’Elliott Smith est retrouvé mort de deux coups de couteau dans la poitrine. Suicide ? Même aujourd’hui sa mort demeure vaporeuse, tout comme l’univers musical de Smith dont on visualise les paysages de détresse voilés d’une fumée continue. Ce song-writer du Nebraska laisse derrière lui sept albums dont deux posthumes aux sonorités folk-rock indé, acoustiques et urbaines. Chez Smith, tout semble peint d’un gris aux profondeurs infinies, souligné d’une voix douce, fluette mais grave.
Né en 1969, Elliott est très tôt confronté à un beau-père violent. Dès 9 ans, influencé par Bob Dylan, les Clash, les Beatles, il se met au piano et à la guitare et écrit ses premières chansons. À 14 ans, il emménage avec son père à Portland et vit ses premières expériences de drogue et d’alcool. Diplômé en philosophie et sciences politiques en 1991, il travaille dans une boulangerie et forme le groupe grunge Heatmiser.
En 1995, Smith commence à enregistrer seul avec sa guitare acoustique, sans arrangement, sans autre accompagnement que sa voix des chansons sur la drogue, la dépendance, la dépression, la trahison. Ces recherches mènent à la création de l’album Roman Candle que sa petite amie le convainc de proposer à la maison de disque Cavity Search Records. Le patron tombe sous le charme. Elliott se lance donc dans une carrière solo. Il maîtrise tous les aspects de sa création et signe un univers morbide, profond et enivrant.
Dans son troisième album Either/or, sorti en 1997, Elliott intègre une instrumentation plus complexe avec basse, batterie et guitare électrique. C’est également en 1997 que Smith est révélé au public grâce au film Will Hunting (Gus Van Sant) dont il signe de nombreuses chansons parmi ses plus connues : « Miss Misery » et « Between the Bars ». En 1998, il enregistre une version a capella de la chanson des Beatles « Because » pour American Beauty.
Smith connaît ensuite de nombreuses périodes de dépression et une dépendance de plus en plus forte à l’héroïne. Il signe deux albums : XO et Figure 8. Jusqu’en 2003, Smith travaille sur de nombreuses chansons, des projets avortés, inachevés ou laissés de côté, qui ne paraîtront que de façon posthume.
Sa mort énigmatique fait bien sûr vendre et parler de lui ; la famille de Smith fait arranger ses dernières bandes (New moon, 2007) et achèvent d’en faire une légende de l’histoire musicale underground américaine. Car, à l’effigie de ses chansons sombres et urbaines, ne fallait-il pas que l’art se poursuive dans la vie… ?