#Extrait du Shaker, n°9, William Shakespeare
Créé en 1836 au Théâtre des vanités (théâtre du divertissement ouvert en 1807 à Montmartre), Kean est immortalisé par l’acteur Frédéric Lemaître. Elle s’inspire de la vie du comédien britannique Edmund Kean, mort trois ans auparavant, que la comédie de Dumas va rendre immortel. Kean est l’allégorie du théâtre shakespearien, c’est-à-dire un théâtre aux actions multiples qui mêle les registres avec un goût prononcé pour le surnaturel et la violence sur scène. Shakespeare est d’ailleurs l’une des grandes influences de Dumas.
Fils illégitime d’une actrice itinérante, Kean est un personnage haut en couleurs. Il a fait ses débuts au théâtre très jeune sous la houlette bienveillante de son oncle qui lui fait découvrir Shakespeare et la pantomime. À 14 ans, il connaît le succès dans une troupe qui met en scène Shakespeare, et il se voit engagé à la cour. Il joue dans les plus grands théâtres anglais.
Les caractéristiques principales de cette personnalité : sa mobilité sur scène, son visage très expressif, le contraste de ses interprétations et sa vie privée excentrique (lion domestique, nombreuses maîtresses,…). Son jeu paraissait improvisé tant il connaissait son rôle par cœur. Début des années 1820, suite à une accusation d’adultère, Kean fuit à New-York pour revenir à Londres, quelques années plus tard, alcoolique. Il s’évanouit sur scène lors d’une représentation d’Othello le 23 mars 1833 et meurt trois semaines plus tard.
Pour interpréter ce personnage, Dumas confie le rôle à Frédéric Lemaître qui jouait dans le quartier du « boulevard du crime » (excellemment représenté dans Les Enfants du Paradis, Marcel Carné, 1945). Lemaître était un acteur rare, parvenant à osciller entre grotesque et sublime sans jamais s’y noyer, notamment grâce à son expérience des arts du cirque. Personnage des planches haut en couleur, Lemaître participe à la révolution scénique de son temps : le théâtre devient le lieu propice à ce que les marginaux soient les héros. Comme Kean dont il interprète le rôle sur scène avec une telle puissance qu’il marque à jamais la pièce de son aura, Lemaître connaît lui aussi une vie extravagante (il échappe de nombreuses fois à ses créanciers, fait attendre le public parce qu’il boit un verre au bar,…) et traversera toutes les couches sociales.
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