Avec ses Paradis artificiels (1860), Baudelaire a ouvert la voie à une veine déjantée de la littérature : celle des drogues.
Avant lui, il y a eu quelques livres remarquables, comme la Confession d’un mangeur d’opium de Thomas de Quincey (1821) dont Charles a livré une traduction et le bien étrange gâteau de Théophile Gautier dans Le Club des hachichins (1846).
Après lui, y’a eu John Fante dans Demande à la poussière (1939) dont la girlfriend aux tendances hystériques s’enferme dans le placard pour fumer ses joints. Et puis, y’a Aldous Huxley avec son livre Les Portes de la perception (1954, donne son nom aux Doors) dont les expérimentations scientifiques sur l’acide inspirent toute une lignée de hippies qui s’y crament le cerveau.
Il en est resté quelques-uns pour raconter leurs trips psychédéliques comme Tom Wolfe et le récit de ses expérimentations de LSD sous une plume journalistique (Acid test (1968). Et bien sûr, Hunter S. Thompson, qui révolutionna le journalisme de terrain, et son long trip halluciné, Las Vegas Parano (1972), durant lequel, avec son pote Raoul Duke, il touche à tout et sans interruption. « une journée au cœur du rêve américain » comme il le sous-titre, associant sa déchéance à celle de la société américaine. 
Des afficionados de l’acide, on en retrouve aussi dans les années 80’s (Moins que zéro, 1985, Bret Easton Ellis) et 90’s (Nouvelles sous ecstasy, 1999, Beigbeder).
Avec le temps, les drogues se durcissent et des témoignages chocs révèlent les ravages de la seringue chez les adolescents à des parents qui n’avaient même jamais envisagé que leur progéniture puissent se dévergonder si tôt (car drogues = moyens de s’en procurer et donc prostitution, vol, arnaques, etc). Le plus connu reste Moi, Christiane F., 13 ans, droguée, prostituée, mais il y a eu aussi L’Herbe bleue passé pour un journal anonyme avant de découvrir l’identité de l’autobiographe (Béatrice Sparks, 1971).
Au début c’est l’extase, « mieux que le sexe » dit Tommy dans Trainspotting (Irvin Welsh, 1993), le livre de toute une génération de paumés et déglingués du bocal. Mais ça entraîne loin, très loin dans les abîmes les plus sombres dont on ne revient qu’amputé comme le prouve le bras gangrené de Harry dans Retour à Brooklyn (ou Requiem for a dream, Hubert Selby Jr., 1964).
Et pourtant y’en a d’autres qui inventent encore d’autres drogues comme le « Moloko plus » d’Orange mécanique (Anthony Burgess, 1962), un cocktail à base de lait, de psychotropes et d’hallucinogènes qui a tendance à rendre (un peu) violent.  
Ce qui semble certain, c’est qu’on n’écrit pas dans cette veine littéraire sans avoir tâté un peu l’un ou l’autre des paradis artificiels qui ne font jamais voir que la surface policée des choses, quoi qu’en aient dit les hippies et leurs soi-disant visions de la Vérité.
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