La mémoire de l'holocauste est une mémoire que nous avons appréhendée sur les bancs de l’école et qu’il est pour chacun essentielle de transmettre. Ne pas oublier. Préserver cette mémoire pour que cela n’arrive jamais plus.
Une mémoire pourtant parfois remise en question. 
C'est le cas en Pologne, notamment comme le montre le réalisateur Jonathan Hayoun dans son documentaire Sauvez Auschwitz ?. Une question qui, pour nombre d’entre nous, paraît absurde : bien sûr qu’il faut préserver cette mémoire. Et elle en passe aussi par ce lieu longtemps laissé à l’abandon parce qu’on ne savait pas quoi en faire. Il est inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO en 1979 pour servir le fameux « devoir de mémoire ». On devrait dire « seulement » en 1979! Car pourquoi si tardivement ?
Entre 1945, la libération du camp par les alliés, et 1979, que s’est-il passé ? Le temps de réaliser peut-être, jamais vraiment comprendre comment un tel lieu a pu exister mais au moins prendre conscience de son existence effective. Et donc que faire de cet endroit ? Le raser serait oublier.
Pourtant aujourd’hui il se visite comme tout autre lieu de mémoire, comme un musée, avec des guides, des vastes hangars vides où s’entassent derrière des grilles des milliers d’effets personnels : chaussures, vêtements, lunettes, les cheveux rasés des têtes des détenus, sont, eux, depuis longtemps devenus poussière. 
C’est ce que reprochent d’ailleurs certains des derniers survivants des camps : le musée fige un lieu vide où on ne peut qu’imaginer, mais ce qui faisait l’horreur de ce lieu, c’était les milliers de corps désincarnés qui ont foulé ces sols ensanglantés.
Oui, mais la vie continue. 
Hors de cette enceinte, il y a les habitants d’Auschwitz - la ville qui s’est construite autour du camp - où vivent des centaines de personnes avec vue panoramique sur les barbelés. Ils se plaignent de l’affluence des visiteurs qui perturbent leur tranquillité, ils font signer des décrets pour empêcher les bus de touristes de passer à côté des voies ferrées qui menèrent des milliers de personnes à la mort mais qui passent aussi juste devant chez eux.
Car la question est toujours là : honorer la mémoire, oui, mais il y a aussi la vie, l’herbe qui a repoussé depuis longtemps autour et dans le camp. Et puis, a-t-on besoin d’un lieu pour se souvenir ?
En parallèle à ce documentaire, André Singer livre un autre documentaire intitulé Images de la libération des camps : chronique d’un film inachevé qui retrace l’histoire de ce projet de film monté à partir des dizaines d’heures de bandes filmées par les alliés lorsqu’ils découvrirent les camps à la libération. Un projet, auquel contribua notamment Hitchcock, finalement abandonné, pour finir dans les archives cachées au public. Des images innommables, insupportables. Et pourtant, n’a-t-on pas parfois besoin de renouveler le choc que provoquent ces images quand on assiste à de nouvelles montées d’extrémisme ? 
Et lire, relire Primo Levi n’est-il pas toujours aussi essentiel aujourd’hui qu’il l’a été au sortir de la seconde guerre mondiale ? Ne pas oublier que « jamais, plus jamais » ne coule pas de source pour tout le monde…
Back to Top